Dans l’incipit de son essai Le Nouveau théâtre québécois, Michel Bélair écrit : « depuis cinq ans, le théâtre québécois s’impose comme une de voies essentielles de l’affirmation québécoise » (Bélair 1973 : 9), en faisant coïncider sa naissance officielle avec Les Belles-Sœurs (1965) de Michel Tremblay. En effet, si, jusqu’à 1945, la production théâtrale de la Nouvelle-France se limitait essentiellement à émuler les modèles français, des mélodrames des théâtres du Boulevard au théâtre classique, ce n’est qu’à partir de l’après-guerre et avec la Révolution tranquille que le Québec va s’approprier progressivement d’une dramaturgie nationale autonome. Ce procès de « québécisation » à la fois artistique, politique et sociale, qui se passe aussi à travers la langue en promouvant l’emploi du joual et « une esthétique réaliste fondée en bonne part sur le rejet du “français de France” » (Brisset 1990 : 34), est pourtant d’autant plus significatif si on considère la contribution de Jean-Claude Germain. Fondateur, en 1969, du Théâtre du Même Nom et directeur général, de 1972 à 1982, du Centre du Théâtre d’Aujourd’hui, Germain, dans sa vaste et prolifique production littéraire, se fait promoteur d’une véritable décolonisation culturelle – ou « contre-culture » (Larose et Rondeau 2016) – du théâtre québécois. En particulier, bien que très peu étudiée par la critique, sa première pièce Les Enfants de Chénier dans un autre grand spectacle d’adieu (1969), résultat d’une création collective, « consacrait la faillite du théâtre institutionnel – le théâtre dominant, le “théâtre des autres” » (Larrue 2016 : 306), en faveur d’un théâtre nouveau, inédit, original et authentiquement québécois, capable de raconter la vraie essence de son peuple. Ma communication vise donc à explorer et exposer les stratégies textuelles de « cette mise à mort, cette décolonisation du théâtre » (Martel 2015 : 326-327) avec laquelle Germain, dans son œuvre, refuse toute forme théâtrale importée et essaie de déconstruire la tradition théâtrale française pour proposer à son public un théâtre qui soit québécois comme les Québécois-mêmes.
Les enfants de Chénier dans un autre grand spectacle d’adieu de Jean-Claude Germain: mouvements d’une décolonisation du théâtre québécois
RAVERA E
2022-01-01
Abstract
Dans l’incipit de son essai Le Nouveau théâtre québécois, Michel Bélair écrit : « depuis cinq ans, le théâtre québécois s’impose comme une de voies essentielles de l’affirmation québécoise » (Bélair 1973 : 9), en faisant coïncider sa naissance officielle avec Les Belles-Sœurs (1965) de Michel Tremblay. En effet, si, jusqu’à 1945, la production théâtrale de la Nouvelle-France se limitait essentiellement à émuler les modèles français, des mélodrames des théâtres du Boulevard au théâtre classique, ce n’est qu’à partir de l’après-guerre et avec la Révolution tranquille que le Québec va s’approprier progressivement d’une dramaturgie nationale autonome. Ce procès de « québécisation » à la fois artistique, politique et sociale, qui se passe aussi à travers la langue en promouvant l’emploi du joual et « une esthétique réaliste fondée en bonne part sur le rejet du “français de France” » (Brisset 1990 : 34), est pourtant d’autant plus significatif si on considère la contribution de Jean-Claude Germain. Fondateur, en 1969, du Théâtre du Même Nom et directeur général, de 1972 à 1982, du Centre du Théâtre d’Aujourd’hui, Germain, dans sa vaste et prolifique production littéraire, se fait promoteur d’une véritable décolonisation culturelle – ou « contre-culture » (Larose et Rondeau 2016) – du théâtre québécois. En particulier, bien que très peu étudiée par la critique, sa première pièce Les Enfants de Chénier dans un autre grand spectacle d’adieu (1969), résultat d’une création collective, « consacrait la faillite du théâtre institutionnel – le théâtre dominant, le “théâtre des autres” » (Larrue 2016 : 306), en faveur d’un théâtre nouveau, inédit, original et authentiquement québécois, capable de raconter la vraie essence de son peuple. Ma communication vise donc à explorer et exposer les stratégies textuelles de « cette mise à mort, cette décolonisation du théâtre » (Martel 2015 : 326-327) avec laquelle Germain, dans son œuvre, refuse toute forme théâtrale importée et essaie de déconstruire la tradition théâtrale française pour proposer à son public un théâtre qui soit québécois comme les Québécois-mêmes.File | Dimensione | Formato | |
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