Comme le remarque Susan Sontag (2005), la maladie et ses représentations – notamment en littérature – comprennent, depuis toujours, une forte composante métaphorique La pièce Rhinocéros d’Eugène Ionesco nous offre un exemple significatif : c’est par le biais d’une épidémie imaginaire de « rhinocérite » que l’auteur franco-roumain voulait en effet dénoncer la montée des totalitarismes et la violence des hystéries collectives Bérenger, le protagoniste, incarne le symbole de la résistance ionesquienne et de la lutte obstinée contre la fascination du Mal, dont la bizarre pandémie zoomorphe devient le synonyme Si, chez Ionesco, la narration de la diffusion de la maladie est tout à fait vraisemblable, puisque le dramaturge décrit minutieusement l’évolution des différentes étapes de la contagion et son influence sur le comportement des personnages, l’expérience globale de la Covid-19 peut maintenant représenter l’occasion précieuse de relire ou, pour paraphraser Barthes (1984), de faire renaître cette œuvre célèbre, en se focalisant sur la thématique de la maladie de façon plus concrète et réaliste Cette contribution vise donc à offrir une analyse des dynamiques textuelles qui caractérisent la représentation du Mal et sa force allégorique dans Rhinocéros à la lumière de l’expérience encore récente de la crise sanitaire liée au coronavirus : nous essayerons de mettre en relief les analogies entre la diffusion – imaginaire – de la rhinocérite et celle – malheureusement bien réelle – du Sars-Cov-2, surtout en ce qui concerne leurs conséquences et leur impact sur la masse du point de vue psychologique Les rhinocéros de Ionesco, métamorphose pachydermique du Mal, peuvent ainsi constituer un instrument important pour étudier et imaginer de nouvelles formes de résistance : leur « charme incertain » (Ionesco 2019 : 245) est l’expression de la « mythologie populaire » (Sontag 2005 : 26) d’une pandémie affectant, avant les corps, la faiblesse des esprits
Entre rhinocérite et Covid-19 : la maladie comme métaphore du Mal dans Rhinocéros d’Eugène Ionesco
Elena Ravera
2024-01-01
Abstract
Comme le remarque Susan Sontag (2005), la maladie et ses représentations – notamment en littérature – comprennent, depuis toujours, une forte composante métaphorique La pièce Rhinocéros d’Eugène Ionesco nous offre un exemple significatif : c’est par le biais d’une épidémie imaginaire de « rhinocérite » que l’auteur franco-roumain voulait en effet dénoncer la montée des totalitarismes et la violence des hystéries collectives Bérenger, le protagoniste, incarne le symbole de la résistance ionesquienne et de la lutte obstinée contre la fascination du Mal, dont la bizarre pandémie zoomorphe devient le synonyme Si, chez Ionesco, la narration de la diffusion de la maladie est tout à fait vraisemblable, puisque le dramaturge décrit minutieusement l’évolution des différentes étapes de la contagion et son influence sur le comportement des personnages, l’expérience globale de la Covid-19 peut maintenant représenter l’occasion précieuse de relire ou, pour paraphraser Barthes (1984), de faire renaître cette œuvre célèbre, en se focalisant sur la thématique de la maladie de façon plus concrète et réaliste Cette contribution vise donc à offrir une analyse des dynamiques textuelles qui caractérisent la représentation du Mal et sa force allégorique dans Rhinocéros à la lumière de l’expérience encore récente de la crise sanitaire liée au coronavirus : nous essayerons de mettre en relief les analogies entre la diffusion – imaginaire – de la rhinocérite et celle – malheureusement bien réelle – du Sars-Cov-2, surtout en ce qui concerne leurs conséquences et leur impact sur la masse du point de vue psychologique Les rhinocéros de Ionesco, métamorphose pachydermique du Mal, peuvent ainsi constituer un instrument important pour étudier et imaginer de nouvelles formes de résistance : leur « charme incertain » (Ionesco 2019 : 245) est l’expression de la « mythologie populaire » (Sontag 2005 : 26) d’une pandémie affectant, avant les corps, la faiblesse des espritsI documenti in IRIS sono protetti da copyright e tutti i diritti sono riservati, salvo diversa indicazione.
