Le texte aborde le sujet de la traduction théâtrale et du statut du traducteur pour le théâtre, en essayant de mettre en relief, d’un côté, les différentes atteintes à la subjectivité que doit subir le traducteur théâtral, et, de l’autre, les stratégies permettant de faire ressortir cette même subjectivité. Tâche compliquée s’il en est, la traduction pour la scène entraîne un risque extrême de dé-subjectivation pour le traducteur. Dans la première partie, le texte se concentre sur les nombreuses exigences qui limitent les choix possibles de celui-ci: - vocation à la représentation (tentative de conservation d’une prétendue jouabilité inscrite dans le texte, réduction du traducteur à simple anneau d’une chaîne interprétative qui, partant du dramaturge, passe par le metteur en scène et par les acteurs avant d’atteindre le public, difficulté ultérieure due à l’impraticabilité de stratégies compensatoires telles les notes explicatives); - respect des codes (culturels, théâtraux) du système d’arrivée. Sur scène, ce aspect devient primordial: comme le suggère Sirkku Aaltonen, c’est la notion même de fidélité qui est mise en cause et ressort complètement bouleversée par l’épreuve du théâtre. Dans la deuxième partie, l'article prend appui sur une expérience vécue directement par l’auteur: la traduction double d’un texte théâtral d’Adolphe Nysenholc, "Survivre ou la mémoire blanche" (première version réalisée individuellement, révision successive avec le dramaturge). Il est abordé, entre autres, le rôle joué dans le travail de traduction par l’auteur du texte original, qui détient, même du point de vue légal (mais est-ce correct?), un pouvoir très fort sur la traduction, ce qui peut mener à une réduction ultérieure de la valeur de l’interprétation du traducteur. Si le champ d’action du traducteur apparaît amoindri par les contraintes que nous venons de mentionner, la fin du texte essaie d’ouvrir des voies d’action détournées, permettant au traducteur de préserver le côté subjectif de son travail: comme le rappellent Berman ou Venuti, ses choix peuvent seconder les tendances ethnocentriques du système d’arrivée ou bien se poser de façon critique ou antagonique par rapport à celles-ci. C’est par le choix même du texte à traduire, c’est par la mise en cause – plus ou moins poussée – des conventions scéniques et culturelles du système cible, et par la tentative de défendre son texte des «assauts possibles» venant des auteurs, des metteurs en scène et des acteurs que la subjectivité du traducteur peut être préservée.

Traducteurs sous contrainte? La subjectivité du traducteur dans Survivre ou la mémoire blanche, d’Adolphe Nysenholc

F. Regattin
2010-01-01

Abstract

Le texte aborde le sujet de la traduction théâtrale et du statut du traducteur pour le théâtre, en essayant de mettre en relief, d’un côté, les différentes atteintes à la subjectivité que doit subir le traducteur théâtral, et, de l’autre, les stratégies permettant de faire ressortir cette même subjectivité. Tâche compliquée s’il en est, la traduction pour la scène entraîne un risque extrême de dé-subjectivation pour le traducteur. Dans la première partie, le texte se concentre sur les nombreuses exigences qui limitent les choix possibles de celui-ci: - vocation à la représentation (tentative de conservation d’une prétendue jouabilité inscrite dans le texte, réduction du traducteur à simple anneau d’une chaîne interprétative qui, partant du dramaturge, passe par le metteur en scène et par les acteurs avant d’atteindre le public, difficulté ultérieure due à l’impraticabilité de stratégies compensatoires telles les notes explicatives); - respect des codes (culturels, théâtraux) du système d’arrivée. Sur scène, ce aspect devient primordial: comme le suggère Sirkku Aaltonen, c’est la notion même de fidélité qui est mise en cause et ressort complètement bouleversée par l’épreuve du théâtre. Dans la deuxième partie, l'article prend appui sur une expérience vécue directement par l’auteur: la traduction double d’un texte théâtral d’Adolphe Nysenholc, "Survivre ou la mémoire blanche" (première version réalisée individuellement, révision successive avec le dramaturge). Il est abordé, entre autres, le rôle joué dans le travail de traduction par l’auteur du texte original, qui détient, même du point de vue légal (mais est-ce correct?), un pouvoir très fort sur la traduction, ce qui peut mener à une réduction ultérieure de la valeur de l’interprétation du traducteur. Si le champ d’action du traducteur apparaît amoindri par les contraintes que nous venons de mentionner, la fin du texte essaie d’ouvrir des voies d’action détournées, permettant au traducteur de préserver le côté subjectif de son travail: comme le rappellent Berman ou Venuti, ses choix peuvent seconder les tendances ethnocentriques du système d’arrivée ou bien se poser de façon critique ou antagonique par rapport à celles-ci. C’est par le choix même du texte à traduire, c’est par la mise en cause – plus ou moins poussée – des conventions scéniques et culturelles du système cible, et par la tentative de défendre son texte des «assauts possibles» venant des auteurs, des metteurs en scène et des acteurs que la subjectivité du traducteur peut être préservée.
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